par Volker EHRLICH
Ingénieur – Architecte
Enseignant (MAA à l’ENSA Paris – La Villette, ESTP, Université Cergy-Pontoise)
Co-gérant de l’agence Trait Vivant
Co-président du CollectIF Paille
Tout d’abord, merci à la revue MADINATI de m’avoir donné l’opportunité de publier l’article qui suit, concernant un architecte que j’admire et respecte depuis longtemps. Cela est d’autant plus appréciable que j’ai pu aller à la rencontre d’auteurs éminents qui ont, en bonne partie, conforté ma vision de l’œuvre de F. Pouillon.
Dans un premier temps, je souhaite exposer mon point de vue selon l’éclairage suivant : la corrélation entre la force créative de l’architecte et son maillage avec les contraintes dans lesquelles il a dû exercer son métier, ce que j’appelle « les enjeux du pouvoir » ou si l’on préfère « les jeux de pouvoir ».
Puis, il me semble intéressant de regarder de près ce lien entre la création architecturale et la place que lui donne la société actuelle dès lors qu’il s’agit de formes nouvelles, point d’ancrage pour examiner les enjeux et le rôle de cette activité, avec le même engagement que Pouillon à son époque. De tels exemples ont une dimension humaniste et représentent un espoir, celui qui émane de toute œuvre artistique fondée sur la sensibilité, celle qui a fait dire à Dostoïevski « la beauté sauvera le monde » (exclamation de la bouche du prince Mychkine dans l’ouvrage « L’idiot », Fiodor Dostoïevski, 1868.
L’intuition créatrice présente, autant sur le plan technique que sur celui de la composition spatiale et volumétrique d’une part et l’amour de l’humanité, des usagers de l’architecture d’autre part, constituent ensemble la source primaire d’énergie pour la lutte infatigable dont témoigne Pouillon.
Si pour Luis Kahn, l’architecture n’existe pas en tant que telle, il met l’accent sur les « offrandes » qu’on peut lui faire [Lit 5] ; dans le cas de Pouillon, la vision s’enrichit d’une dimension sociale : la société, en tant que telle prend alors également forme à travers les offrandes qui lui sont dédiées.
Fernand Pouillon, personnage respecté par les plus humbles, ouvriers ou souscripteurs, me semble habité par cette conviction : l’importance du sacrifice, aboutissant aux offrandes qu’il signe au nom de la société et de l’architecture. Depuis son investissement indéfectible au quotidien, à la hauteur de l’épuisement physique, jusqu’à la liquidation de sa fortune personnelle pour sauver les derniers chantiers du CNL en cours, sa trajectoire illustre la définition de Thomas Edison « Le génie est 1% d’intuition et 99% de transpiration ».